Finance verte et ESG / RSE : la BCE, la SEC, l’AMF mettent en garde contre le greenwashing, la lutte contre le verdissement abusif dĂ©bute

Seulement 20% des fonds verts ou socialement responsable, le sont, pour l’ensemble des labels majeurs. Cela pose question. Entre verdissement et pure tromperie, les institutions de contrĂ´le entrent en action. La chasse au green washing peut enfin commencer.

La SEC débute réellement sa chasse au greenwashing

La SEC (Ă©quivalent de l’AMF aux USA) vient d’infliger une amende de 1,5 million de dollars pour affirmation trompeuse d’un produit financier qui mettait en avant des critères socialement responsables, non avĂ©rĂ©s. Aux USA, certains fonds prennent la couleur verte en effectuant simplement un don Ă  une association en faveur de la
protection de l’environnement. Cela n’a Ă©videmment rien d’un fonds ESG ou socialement responsable.

En Europe Ă©galement, le verdissement des fonds pose question

PlĂ©thore de labels en tous genre, finance verte, sur le papier... Pour la Banque centrale europĂ©enne, les risques d’un verdissement de façade de la finance vont aller croissant. En particulier pour les Ă©metteurs d’obligations vertes, mais Ă©galement pour certains fonds mettant en avant des critères ESG. La BCE appelle Ă  l’encadrement et l’uniformisation des standards verts.

Le greenwashing

La BCE a publiĂ© lundi un premier extrait de son futur rapport de stabilitĂ© financière, qui se penche sur les risques climatiques. Ses auteurs mettent en garde contre une menace qu’ils redoutent de voir croĂ®tre de plus en plus vite dans les prochaines annĂ©es : le greenwashing. Autrement dit d’un verdissement de façade de la finance, sans rĂ©el impact sur la transition Ă©nergĂ©tique. La banque centrale s’interroge sur la vĂ©racitĂ© de la communication des entreprises sur leurs politiques climatiques, estimant que leurs objectifs de rĂ©duction de CO2, ou leur alignement avec l’Accord de Paris sont « difficiles Ă  Ă©valuer » en l’absence de publications obligatoires et standardisĂ©es.

De trop nombreuses entreprises se découvrent des vertus environnementales depuis quelques années...

"Il est indispensable d’Ă©viter le dĂ©voiement de la notion mĂŞme d’ESG , bref d’Ă©viter un green washing qui serait Ă  tous Ă©gards très dĂ©sastreux", a estimĂ© le prĂ©sident du rĂ©gulateur français, Robert Ophèle, Ă  l’occasion des Entretiens de l’AMF, consacrĂ©s cette annĂ©e Ă  la finance durable. Pour ce faire, "il est nĂ©cessaire de pouvoir s’appuyer sur un corpus de standards minimaux" Ă©tablis au niveau europĂ©en, selon lui. "L’Ă©pargnant veut avoir des Ă©lĂ©ments pertinents, savoir dans quoi il investit, c’est dĂ©terminant mais avec un certain nombre de normes et de seuils minimaux", ce qui incombe au rĂ©gulateur, a plaidĂ© M. Ophèle.

L’AMF et l’ACPR doivent contrĂ´ler que la finance verte l’est effectivement

Dans une vidĂ©o diffusĂ©e en conclusion de la confĂ©rence, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire a estimĂ© que "la question du contrĂ´le est dĂ©cisive". "Il faut garantir aux particuliers, aux citoyens, que la finance verte est rigoureuse et que chaque euro qui est labellisĂ© finance verte aille bien vers des investissements verts. Et c’est lĂ  que l’AMF, que l’ACPR (le gendarme des secteurs de la banque et de l’assurance, NDLR) ont un rĂ´le absolument crucial Ă  jouer", a-t-il plaidĂ©.

Les obligations vertes (green bonds)

Le marchĂ© des green bonds en prend aussi pour son grade. Les chercheurs de la BCE se sont notamment penchĂ©s sur l’existence d’un « greenium ». Il s’agit d’une sorte de prime liĂ©e Ă  la très forte demande pour des titres environnementaux accordĂ©e aux Ă©metteurs, qui, leur permet de bĂ©nĂ©ficier de meilleures conditions de financement pour leurs obligations vertes que pour leurs obligations classiques. Un argument mis en avant pour inciter les entreprises Ă  se lancer dans les obligations vertes. Mais, avertit la banque centrale, seuls les green bonds les plus sĂ©rieux, qui font l’objet d’une Ă©valuation externe peuvent bĂ©nĂ©ficier d’une telle prime.
LĂ  encore, c’est la rĂ©elle dĂ©termination des Ă©metteurs Ă  verdir leur action qui inquiète le plus. « Le greenwashing pose un risque pour la stabilitĂ© financière, car il pourrait conduire Ă  une sous-estimation du risque liĂ© Ă  la transition, et Ă  un mouvement de vente massive de green bonds », redoutent les auteurs qui mettent en avant les efforts de l’Union europĂ©enne pour mettre en place un corps de règles ambitieuses dans ses « green bond standards  ».

Manque de labels ?

Le Monde de la gestion d’actifs, qui a Ă©tĂ© secouĂ© par les propos du patron mondial de l’investissement responsable d’HSBC AM estimant que le risque climatique Ă©tait surĂ©valuĂ© , est, lui aussi, dans le collimateur. Notamment les fonds dits ESG (environnement, social et gouvernance). L’Ă©tude relève que seuls 20 % des fonds labellisĂ©s ESG sont reconnus comme tels par l’ensemble des trois principales agences actives dans ce domaine. Et il est difficile de dĂ©terminer, s’il s’agit d’un vĂ©ritable changement de paradigme, ou un simple jeu de rĂ©allocation d’actifs.

Les fonds d’investissement responsable banalisent les Ă©nergies fossiles

Quant aux banques, elles sont assez lentes dans leurs efforts de verdissement . Les auteurs notent mĂŞme une lĂ©gère augmentation de l’intensitĂ© carbone des portefeuilles des Ă©tablissements bancaires. La route vers le « net zĂ©ro » s’annonce longue.